Sur la place de Saubusse s’élève une belle maison du XVIIIe siècle, "Betbeder" ("belle vue" en gascon) avec panorama sur le pont qui enjambe l’Adour. Le nom de la place, les initiales sur le pont, rappellent le souvenir d’Eugénie Desjobert, née Delachaux, qui fut propriétaire de la maison, initia et finança le pont et, plus largement, dispensa sa fortune sur la commune de Saubusse et le département des Landes dont elle fit, en 1880, son légataire universel.
Le visiteur de l’église, qui fait face à Betbeder, ne porte peut-être pas attention à la dalle funéraire un peu effacée sur laquelle il marche, à l’entrée de l’édifice. C’est pourtant celle d’une femme à la destinée peu banale : Anne Collin, épouse Delachaux, née à Bruxelles en 1764 et morte à Saubusse en 1827, mère d’Eugénie et de Guillaume-Tell Delachaux. Si Eugénie est bien connue des Sibusates et des Landais, ses parents et son frère, à qui l’on doit l’installation de cette famille à Saubusse en 1825, ne le sont pas.
C’est au plus fort de la Révolution, en 1793, que se noue une histoire d’amour entre Anne Collin, alors épouse d’un échevin de Lille, Imbert de Lambersart, et Louis Abraham Delachaux, négociant neufchatelois de pendules issu d’une famille protestante qui avait fui la France sous Louis XIV et pour l’heure sans le sou. La guillotine mit fin aux jours d'Imbert en mai 1794. Quelques mois plus tard (mais pas neuf !), naissait Guillaume-Tell Delachaux dont les parents se marièrent en 1795, bénéficiant, elle la catholique, lui le protestant, du mariage civil créé en 1792.
Agissant comme munitionnaire aux armées pendant cette période troublée et risquée, Louis Abraham Delachaux sut accumuler une grosse fortune et bénéficier de l’appui des puissants du moment, y compris en donnant à son fils le nom du héros de la liberté suisse.
Sous le Consulat, ses filles s’appellent Eugénie et Hortense, référence aux beaux-enfants de Bonaparte. Louis Abraham meurt en 1805, mais Anne poursuit la consolidation de la position de la famille. En 1821, le duc de Richelieu, Premier Ministre, et le comte Pasquier, Ministre des Affaires étrangères, signent le contrat de mariage de sa fille Eugénie avec Charles Desjobert, diplomate, famille noble d’Ancien Régime. Eugénie mourra très âgée, après avoir enterré ses frère et sœurs, son mari, son beau-frère et ses enfants.
Elle s’installe à Saubusse dans la maison que lui a léguée son frère et dont elle gardera beaucoup de souvenirs conservés aujourd’hui : portraits, lunette astronomique, collection minéralogique...
Pour en savoir plus, découvrez l'histoire de la famille Desjobert-Delachaux racontée par Mireille TOUZERY, descendante de Blanche Fialon (Université Paris est-Créteil) ICI.
Découvrez également l'histoire de l'immeuble Eugénie Desjobert, qui abrite aujourd'hui la Mairie, la Bibliothèque et le Musée ICI.